Ca y est c’est janvier et les sapins font le trottoir. Ca commence à puer la frangipane. Les enfants veulent tous aller sous la table, c’est drôle cette guerre qu’ils se livrent chaque année pour quelques minutes d’autorité. On leur laissera la fève exprès et ils croiront qu’ils ont encore eu de la chance. Avec la galette des rois, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tiendra jamais.
Il y a des nouveaux jouets dans les placards, mais ils ont déjà un peu perdu de leur attrait. Les adultes sont fauchés. Plus un radis, et c’est pas la carte cadeau de Mémé qui payera le crédit. D’ailleurs on l’oubliera, et on finira par la jeter une fois qu’on la retrouvera périmée.
Les enfants doivent recommencer à se coucher tôt. Il faut « reprendre le rythme » comme on dit. Reprendre la vie normale, celle où c’est pas noel demain.
Le plus beau est derrière nous, c’est pour ça que j’ai toujours haï janvier.
Le soir on ouvrira une bouteille de champagne qui reste du réveillon, et on aimera bien le goût qu’il a quand il n’y a aucune raison. On va recommencer à faire sonner le réveil tôt, et chercher en râlant un gant perdu, jusqu’au jour un peu moins froid où on décidera qu’on peut faire sans.
On s’appliquera au début pour écrire dans l’agenda tout neuf, en janvier on a toujours un peu 12 ans. On retrouvera une boule de Noël derrière le canapé, et janvier sera déjà presque passé.
On dira « déjà un mois qu’ils étaient tous là », et à peine le temps de répondre que ça sera février. On se souviendra des bons moments. Sans un 24 ou un 31 sur lesquels river nos yeux on aura l’impression qu’on a la vie devant nous, et on programmera un de ces week end qu’on ne prévoit qu’avant le printemps, les bourgeons et les agendas chargés.
Et puis mars viendra, avec aux lèvres son sourire d’enfant prodige. Et puis Ça recommencera à jouer dehors un peu trop tard pendant que les parents prennent l’apéro et ça sera reparti pour un tour. Je ne sais pas pourquoi, mais cette année je pense d’avantage à ce qui n’a pas encore été qu’à ce qui ne sera plus. J’ai fait la paix avec janvier et ça vaut mieux, au cas où il y en aurait plein d’autres qui suivraient.